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un amendement remet le capital-investissement d’entreprises sur ses rails

Un amendement remet le capital-investissement d’entreprises sur ses rails

 

Mardi 2 décembre 2014

Le dispositif connu sous le nom de "Corporate Venture" entrera t-il enfin en vigueur? L'amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2014, tout juste déposé par le gouvernement, devrait redonner de l'espoir aux dirigeants de PME innovantes et aux gérants de fonds de capital risque. 

Par Florence Moulin, avocate à la Cour (Jones Day)

Il y a un an, PME Finance avait salué la mesure introduite à l'article 217 octies du CGI qui permet à toutes les sociétés d'amortir sur 5 ans les sommes qu'elles investissent directement ou indirectement (au travers de FCPR, FPCI ou SCR) au capital de PME innovantes. Sous réserve que le « corporate » ne détienne pas plus de 20% du capital ou des droits de vote de la PME, il peut déduire le montant ainsi souscrit de son assiette imposable à l'impôt sur les sociétés (IS), à hauteur de 20% par an sur 5 ans.

Mais l'impatience et le mécontentement commençaient à monter du coté des chefs d'entreprise et des gérants de fonds. Car onze mois après l'adoption du dispositif, ceux qui étaient en cours de levée ne pouvaient toujours pas se prévaloir de cet avantage pour convaincre les corporate de participer à leur financement. En effet, le dispositif devait recevoir l'aval de Bruxelles. 

 Les déclarations de Michel Sapin, lors de la conférence du capital-développement du 25 octobre dernier, laissaient encore planer le doute.

C'est justement l'objet de l'amendement déposé : la Commission Européenne a exigé que le gouvernement français aménage le dispositif pour que ce dernier soit déclaré conforme au droit de l'Union Européenne en matière d'aides d'État. 



Ainsi, l'amendement apporte quelques aménagements à la notion de PME innovante. Les entreprises en difficulté (au sens de la règlementation européenne) et les PME innovantes cotées sur un marché réglementé sont désormais exclues. Seules les PME cotées sur Alternext ou non cotées sont éligibles.

Par ailleurs, afin de satisfaire la nouvelle règlementation européenne (id est, les lignes directrices de janvier 2014), les versements réalisés dans des PME innovantes au titre du Corporate Venture seront plafonnés par PME à la somme de 15 millions d'euros (sans limitation dans le temps).

Enfin, pour être qualifiée de PME innovante, l'entreprise ne pourra plus se prévaloir du label innovant donné par Bpifrance. Elle devra justifier qu'au cours d'un des 3 derniers exercices précédent la souscription du corporate, ses dépenses de recherche ont représenté au moins 10% de ses charges d'exploitation. Pour les entreprises nouvelles, ce critère sera vérifié sur la base d'une estimation ex ante. 



En ce qui concerne les fonds d'investissement, l'amendement élargit leur champ, jusque là limité aux véhicules francais (FCPR, FPCI et SCR investis à hauteur d'au moins 70% en PME innovantes). Les fonds d'investissement situés dans un État membre de l'Union Européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen conventionné avec la France sont désormais visés.

Surtout, l'amendement oblige les fonds qui réalisent une opération secondaire sur une PME innovante à réaliser "au cours de leur période d'investissement"  également une opération primaire sur cette même PME, pour un montant au moins égal à la moitié de l'opération secondaire. 



En ce qui concerne les corporates, ils n'auront pas droit à un amortissement fiscal s'ils souscrivent au capital d'une PME innovante dont ils ont déjà des actions et pour lesquelles ils n'ont pas bénéficié de l'amortissement. Cette mesure vise à "éviter tout effet d'aubaine" selon le gouvernement.

Cet amendement ne devrait pas pouvoir être retoucher sans risquer une décision négative de Bruxelles. Les marges de manoeuvre sont donc très limitées. Si l'amendement est adopté, le dispositif entrera en vigueur pour "dix ans" (suivant l'amendement) à compter d'une date fixée par décret. Il ne reste donc plus qu'à souhaiter que le décret soit publié dans les premiers jours de janvier. Après tout, le Ministre de l'Economie n'a t-il pas annoncé en septembre dernier, lors des Assises du financement et de l'investissement, son ambition de tripler le capital-risque d’entreprises (250M€ en 2013) sur les trois prochaines années?

F.M.