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121031 Après les Pigeons, une loi de finances

Après les Pigeons, une loi de finances

31 octobre 2012

En un mois, les protestations des entrepreneurs et de leurs écosystème contre la réforme de la fiscalité des plus-values mobilières ont gonflé, puis reflué. Le gouvernement, qui avait reconnu une probable « erreur » et réaffirmé sa volonté de travailler avec les entrepreneurs au colloque de PME Finance le 5 octobre, a considérablement assoupli le régime de ces plus-values par voie d’amendement.
Cependant, certains cas méritent d’être ré-examinés : celui des business angels et des actionnaires minoritaires de long terme, comme les salariés, notamment. Ou encore celui où le fondateur, devenu minoritaire, entre en conflit avec des fonds d’investissement à son capital quatre ans et quelques mois après la creation: la loi actuelle renforce le pouvoir de négociation des actionnaires majoritaires, ce qui n’est sans doute pas le but recherché.
Au moment où le Sénat se prépare à examiner le projet de lois de finances, PME Finance vous propose ci-dessous une note technique qui examine le nouveau régime d’imposition de droit commun des plus-values mobilières, la limitation du durcissement de la fiscalité des plus-values des entrepreneurs, le maintien du régime de taxation du carried interest et les normes couvrant le réinvestissement et report d’imposition.
Nous vous proposons de venir en débattre lors d’un colloque d’actualité sur l’impact du projet de loi s’il était adopté en l’état, et les perspectives qui se dégagent, organize à Lyon, ce mercredi 7 novembre, par PME Finance Rhône-Alpes.
Programme et inscription


Projet de loi de finances pour 2013 : le régime des plus-values (article 6 amendé)

Sommaire :

  1. Régime d’imposition de droit commun des plus-values mobilières
  2. Limitation du durcissement de la fiscalité des plus-values des entrepreneurs
  3. Réinvestissement et report d’imposition
  4. Maintien du régime de taxation du carried interest

1) Régime d’imposition de droit commun des plus-values mobilières

Les textes actuellement en vigueur prévoient une imposition des plus-values mobilières au taux forfaitaire de 19%.
Ce régime est supprimé par le PLF pour 2013 qui soumet donc les plus-values mobilières réalisées à compter du 1er janvier 2013 au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Rappelons que dans le PLF initial, ce nouveau régime s’appliquait aux plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2012.

Ce régime s’applique aux :
- gains nets de cession à titres onéreux d’actions et de parts de sociétés, de droits portant sur ces parts ou actions ou de titres représentatifs de ces mêmes parts, actions ou droits,
- distributions d’une fraction des actifs d’un FCPR aux porteurs de parts ordinaires et aux porteurs de parts de carried interest,
- distributions de plus-values aux titulaires de parts ou d’actions de « carried interest » d’entités européennes de capital investissement,
- distributions réalisées par une SCR qui sont prélevées sur les plus-values de la cession des titres de son portefeuille.

Par ailleurs, le montant de ces plus-values sera réduit d’un abattement égal à :
- 20% de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins 2 ans et moins de 4 ans à la date de la cession.
- 30% de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins 4 ans et moins de 6 ans à la date de la cession.
- 40% de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins 6 ans.

En principe la durée de détention est décomptée à partir de la date de souscription ou d’acquisition des actions, parts, droits et titres.
Toutefois, en ce qui concerne les plus-values distribuées par un FCPR, une entité de capital risque ou une SCR, la durée de détention serait décomptée à partir de la date la plus récente entre :
- la date de l’acquisition ou de la souscription des titres du fonds ou de la société par le contribuable, et
- la date de l’acquisition ou de la souscription des titres cédés par le fonds ou la société.

2) Limitation du durcissement de la fiscalité des plus-values des entrepreneurs

Suite à la « révolte » des « pigeons », le gouvernement a introduit un régime dérogatoire de taxation des plus-values. Les entrepreneurs pourraient, sur option, soumettre leur plus-values au taux forfaitaire de 19% (et non pas au taux décrit au point 2/ ci-dessus) sous réserve que les conditions suivantes soient remplies :
- Nature de l’activité de la société dont les titres ou droits sont cédés :
Elle exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l’exclusion des activités procurant des revenus garantis en raison de l’existence d’un tarif réglementé de rachat de la production, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l’article 885 O quater et des activités immobilières. Cette condition s’apprécie de manière continue pendant les dix années précédant la cession.
- Durée de la détention :
Les titres ou droits détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, doivent avoir été détenus de manière continue au cours des cinq années précédant la cession. Cette durée de détention est décomptée à partir de la date d’acquisition ou de souscription des titres ou droits.
- Pourcentage de la détention :
Les titres ou droits détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, doivent avoir représenté, de manière continue pendant au moins deux ans au cours des dix années précédant la cession des titres ou droits, au moins 10 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ;
Les titres ou droits détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, doivent représenter au moins 2 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés à la date de la cession.
- Fonctions du cédant au sein de la société :
Le contribuable doit avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue au cours des cinq années précédant la cession :
(i) soit une fonction de gérant (si la société est une Sarl ou une société en commandite par actions) , soit la fonction d’associé (si la société est une société de personnes), soit la fonction de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire (si la société est une société par actions) , ou
(ii) soit une activité salariée au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés.
Les fonctions énumérées ci-dessus doivent être effectivement exercées et donner lieu à une rémunération normale. Celle-ci doit représenter plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis notamment à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux.

3) Réinvestissement et report d’imposition

Mécanisme de sursis à imposition de certaines plus-values (article 150-0 D bis du CGI)
Les plus-values concernées doivent remplir les conditions suivantes :
(i) les titres cédés doivent avoir été détenus de manière continue depuis plus de 8 ans,
(ii) les titres détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, doivent avoir représenté, de manière continue pendant les huit années précédant la cession, au moins 10 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés,
(iii) la société dont les titres sont cédés doit remplir les conditions suivantes :
- être passible de l'IS ou d'un impôt équivalent ou soumise sur option à cet impôt,
- exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités précitées. Cette condition s'apprécie de manière continue pendant les huit années précédant la cession,
- avoir son siège social dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.
Par ailleurs, le report d’imposition ne joue que si une partie de la plus-value réalisée est réinvestie dans les conditions décrites ci-après :
- le produit de la cession des titres doit être investi dans un délai de 24 mois et à hauteur de 50 % du montant de la plus-value, net des prélèvements sociaux, dans la souscription en numéraire au capital initial ou dans l'acquisition de capital en numéraire dans une ou plusieurs sociétés.
- la société bénéficiaire de l’apport doit respecter les conditions mentionnées au (iii) ci-dessus.
- les titres représentatifs de l'apport en numéraire doivent être entièrement libérés au moment de la souscription ou de l'augmentation de capital ou, au plus tard, à l'issue du délai de 24 mois mentionné ci-dessus, et représenter au moins 5 % des droits de vote et des droits dans les bénéfices sociaux de la société,
- les titres représentatifs de l’apport en numéraire doivent être détenus directement et en pleine propriété par le contribuable pendant au moins 5 ans,
- la société bénéficiaire de l’apport ne doit pas avoir procédé à un remboursement d’apport au bénéfice du cédant, conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs au cours des 12 mois précédant le remploi du produit de la cession.
Dans l’hypothèse où le cédant effectuerait son réinvestissement dans les conditions mentionnées ci-dessus, il est prévu que la plus-value en report d’imposition ne sera imposable qu’à hauteur du montant de la plus-value net des prélèvements sociaux qui n’a pas fait l’objet d’un réinvestissement dans les 24 mois suivant la cession. L’impôt sur la plus-value exigible dans ces conditions est accompagné d’un intérêt de retard, décompté à partir de la date à laquelle cet impôt aurait dû être acquitté. La fraction de la plus-value réinvestie reste en report d’imposition.
Enfin, lorsque les titres ayant fait l’objet de l’apport (c'est-à-dire ceux acquis via le réinvestissement décrit ci-dessus), sont détenus depuis plus de 5 ans, la plus-value en report d’imposition est définitivement exonérée.

4) Maintien du régime de taxation du carried interest

Dans cette nouvelle mouture, le régime de taxation du carried interest a été maintenu, et par conséquent la participation des gestionnaires de private equity aux plus-values continuera à être taxée comme une plus-value mobilière mais selon le nouveau régime de taxation des plus–values mobilières décrit ci-dessous.

Daniel Schmidt,

vice-président de PME Finance,

Avocat à la Cour (Jones Day).