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PEA PME An II

PEA PME, An II

09/04/2015

 

Lancé il y a un an, le PEA-PME n’a pas rencontré le succès escompté lors de son lancement. Ni en termes de collecte, ni en termes de rendement. Mais il ne faut pas mettre au rebut ce produit financier prometteur. Bien au contraire, l’heure doit être à sa dynamisation.

Le PEA-PME a suscité beaucoup d’espoir lors de son lancement, voici douze mois. Mais ce plan d’épargne, né des travaux conduits par l’un des groupes de réflexion de PME Finance, n’a pas atteint en cette première année le milliard d’euros d’épargne pour financer les PME françaises que nous attendions. Inutile d’attendre les statistiques officielles de collecte de la Banque de France pour 2014 – il se dit déjà que 80 000 nouveaux PEA ont permis de réunir environ 230 millions d’euros, soit 12 fois plus que le financement participatif en capital dans la même période. Pourtant, le PEA-PME passe pour un échec alors que le crowdfunding equity représente l’avenir. D’où vient ce paradoxe ?

Plusieurs facteurs ont freiné la montée en puissance du PEA-PME : l'été 2014 a été caractérisé par un décrochage des valeurs moyennes en Bourse, et les réseaux bancaires ont promu le plan avec un surcroît de prudence auprès de leurs clients. En parallèle, le flou a longtemps persisté autour des valeurs éligibles : un an plus tard, toutes les entreprises cotées qui désirent bénéficier du PEA-PME doivent de nouveau se déclarer éligibles auprès d’Euronext. L’accumulation d’écueils au lancement du PEA-PME ne remet pas en cause ses fondements. La place financière ne doit pas, non plus, « jeter le bébé avec l’eau du bain ». Grâce au PEA-PME, le nombre de fonds qui investissent dans les PME-ETI cotées a bondi de 25 à 65. Les comptes PEA-PME représentent entre 20 et 25 % de l’encours total de ces fonds : ils forment une poche d’épargne longue, stable, patiente qui tempère la décollecte pendant les moments difficiles.

L’objectif de 60 000 souscripteurs a été largement dépassé : mi-septembre, d’après le Président de la République, 80 000 PEA-PME avaient déjà été ouverts. Ces comptes, cependant, n’ont reçu en moyenne qu’environ 3 000 euros. Il faut maintenant trouver des mesures simples, sans coût pour l’Etat, pour relancer la machine. Si seulement 5 000 PEA-PME étaient pleinement investis, le montant global de la collecte serait multiplié par 2.

Dynamiser le PEA-PME via une clause de remploi exceptionnelle.

Nombreux sont aujourd’hui les épargnants qui, pour éviter de payer l’impôt sur les plus-values , préfèrent laisser leur argent dans des véhicules monétaires, par exemple, ou dans d’autres parts de FCP ou SICAV actuellement conservées à durée indéterminée ou données dans le cadre de libéralités pour éviter les impacts fiscaux. Leur rentabilité, comme leur intérêt pour l’économie, est désormais proche de zéro. C’est nourri des réflexions du terrain qu’en tant que Sénateur de l’Aube, j’ai élaboré un amendement cosigné par un certain nombre de collègues, introduisant une clause de « remploi » dans le PEA-PME, exonérée d’impôt sur les plus-values pour la seule année 2015, en vue de réorienter cette épargne dormante vers des PME et des ETI de croissance.

Certes, cela engendre un coût budgétaire à première vue : celui de l’impôt sur les plus-values non perçu. Mais il ne s’agit pas d’un manque à gagner pour l’Etat : c’est précisément pour éviter de payer cet impôt que l’argent reste bloqué à vide. Au contraire, le transfert vers le PEA-PME générera de nouvelles recettes, via le forfait social, pour l’Etat. Cette simple mesure permettra de relancer la collecte dès cette année et redressera, en partie, le biais français en faveur de l’épargne de court terme. Le rapporteur thématique de l'Assemblée nationale a parlé en la matière de « vision court terme » et « d’optimisation fiscale » : c’est précisément de l’inverse dont il s’agit, d’autant que le dispositif proposé prévoit des garde-fous anti-abus. Cette solution devrait augmenter considérablement la collecte du PEA PME (avec toutes les retombées inhérentes) cette année, en donnant une nouvelle visibilité et un nouvel essor à ce dispositif sans aggraver la situation budgétaire.

Aller plus loin vers un financement pérenne des PME et ETI.

Pour aller plus loin, et maintenir la collecte au-delà de 2015, il faut comprendre quelle est la relation entre les Français et le capital des PME. Depuis 1997, les FCPI, les FIP et l’ISF PME ont accoutumé quelque 300 000 Français à placer une part de leur épargne dans les petites et moyennes entreprises. Ces dispositifs les y attirent via un avantage fiscal « à l’entrée », qui permet une réduction d’impôt immédiate jusqu’à 50 % de l’investissement.  Certains y ont pris goût et commencent à souscrire à des fonds d’entrepreneurs et de « superangels » : plusieurs centaines de millions d’euros ont été ainsi réunis l’an dernier. Cela cependant ne concerne qu’une petite minorité d’entre eux, particulièrement fortunée.

A l’inverse, le PEA-PME vient élargir la palette des instruments dont le grand public dispose pour allouer son épargne aux entreprises sans coût direct pour l’Etat : l’incitation ne porte que sur la valeur effectivement créée. Il offre un compte simple d’accès, utilisable aussi bien pour la Bourse que pour les investissements en crowdfunding. Une mesure technique[1], sans aucun coût pour l’Etat, permettrait aux banques et aux conseils en investissements financiers de proposer aux Français des plans d’épargne dans des fonds PME-ETI plus rémunérateurs que les livrets réglementés. La place, qui aura un rôle à jouer dans la création de ces fonds obligataires d’un genre nouveau, peut s’inspirer des pionniers en la matière.

Les nouveaux produits financiers tardent souvent à trouver leur place et à être lisibles par le public. Le PEA-PME s’inscrit dans une mouvance dont il faut tenir compte : l’accélération de la croissance des PME issues du capital-risque, qui franchissent les seuils administratifs, fiscaux et sociaux, et deviennent des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Elles représentent le meilleur espoir rattrapage par notre pays du retard qu’il accuse par rapport à ses voisins, dont notamment l’Allemagne, où les ETI sont deux fois plus nombreuses.

Outre la problématique du financement, nos ETI sont soumises à une forme de prédation,  la France ne disposant pas de dispositions législatives satisfaisantes assurant leur protection face aux grands groupes, sous l’angle actionnarial. L’Allemagne a adopté dès 1965 une « Aktiengesetz », qui s’appuie sur la notion de « dépendance » pour prévenir toute décision contraire à l’intérêt de la société de la part de l’actionnaire majoritaire : il s’agit de contrer, dans le cas d’une prise de contrôle, le pillage du capital humain et du savoir-faire des PME-ETI. La loi Macron offre la possibilité de renforcer le mécanisme actuel de « l’abus de majorité » à cette fin et de créer les conditions d’un partenariat fertile entre les grands groupes et les PME-ETI. Tout en leur offrant la possibilité de se financer grâce à la redynamisation du PEA-PME.  Tel est le sens des amendements proposé sur ce thème – d’autres, de même visée, ayant trait à l’assurance-vie qui doit aussi participer davantage à ce financement. Nous mesurerons la fermeté de la volonté gouvernementale à « aller plus loin et à faciliter le financement de notre économie », selon les termes mêmes du Chef de l’Etat.

 
Philippe Adnot, sénateur et président du conseil départemental de l’Aube, secrétaire du Sénat et président d’honneur de PME Finance

 

 

 

 


Jean Rognetta, président de PME Finance